L’IATA s’oppose à « la proposition mal avisée de taxe de solidarité »

L’IATA (Association du transport aérien international) représente quelque 350 compagnies aériennes qui assurent plus de 80 % du trafic aérien mondial.
Une évaluation initiale de la proposition du GSLTF révèle de graves lacunes :
- Une industrie aérienne compétitive ne génère pas de profits excessifs : l’annonce du GSLTF, qui ne contient aucun détail significatif, cite une estimation de CE Delft selon laquelle une taxe sur les voyages « premium » pourrait générer des revenus de 78 milliards EUR (plus de 90 milliards USD) par année. Cela représente environ trois fois les bénéfices de l’industrie aérienne mondiale évalués à 32,4 milliards USD en 2024. La marge bénéficiaire structurellement mince des compagnies aériennes (évaluée à une moyenne de 3,4 % pour l’ensemble de l’industrie en 2024, soit environ la moitié de la moyenne mondiale pour toutes les industries) doit aussi être prise en compte dans les délibérations politiques.
- Les engagements de l’industrie aérienne envers la durabilité représentent plusieurs milliers de milliards de dollars : les compagnies aériennes se sont engagées à éliminer les émissions nettes de carbone d’ici 2050. Cet effort devrait coûter 4700 milliards USD sur la période de 2024 à 2050. Cela va faire en sorte que l’aviation pourra livrer sa contribution directe de 3,9 % du PIB mondial, ainsi que 86,5 millions d’emplois dans le monde, tout en s’attaquant à sa proportion estimée de 2,5 % des émissions mondiales de carbone. Augmenter les taxes sur l’aviation imposées aux compagnies aériennes, comme le veut la proposition, va limiter la capacité de l’industrie d’investir dans des solutions susceptibles de réduire les émissions à long terme.
- Il existe déjà un mécanisme spécialisé de financement du climat pour l’aviation : la proposition du GSLTF néglige le rôle du Régime de compensation et de réduction de carbone pour l’aviation internationale (CORSIA), qui a été adopté dans le cadre de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), comme première mesure acceptée à l’échelle mondiale pour la gestion des émissions de carbone dans un secteur industriel, en l’occurrence l’aviation. Les États du GSLTF ont été parmi ceux qui ont créé le CORSIA, selon le principe qu’il serait la seule mesure harmonisée basée sur le marché pour la gestion des émissions de carbone de l’aviation internationale. Un chevauchement de mesures, comme la taxe de solidarité, minerait le CORSIA et nous entraînerait vers un cadre politique mondial fragmenté, inefficace et incohérent. Il est essentiel que tous les États (y compris ceux du GSLTF) concentrent leurs efforts sur le succès CORSIA plutôt que de promouvoir des mesures redondantes. Le CORSIA a un besoin critique de soutien, et au premier chef, de la part des États qui doivent rendre disponibles les crédits de carbone afin que les compagnies aériennes puissent respecter leurs obligations dans le cadre du CORSIA et que les États puissent obtenir leur financement climatique.
- L’absence d’évaluation de la croissance des coûts est une conséquence inévitable de la taxe proposée : de plus, le GSLTF n’a publié aucune évaluation de l’impact d’un tel prélèvement sur les économies des États auxquels les fonds sont destinés, ou l’impact plus large sur tous les voyageurs. Il n’y a pas non plus de détails sur la quantité de fonds qui seraient utilisés. Bien que le GSLTF présente sa proposition comme ciblant les voyages premium, il ne reconnaît pas l’importance cruciale de ce segment pour la viabilité du réseau de routes. Punir les voyageurs premium ou accabler l’industrie de taxes excessives bouleverserait la dynamique qui permet la connectivité dont dépendent cette année près de cinq milliards de voyageurs. La proposition du GSLTF aurait pour conséquence de rendre les compagnies aériennes moins efficientes et d’ajouter davantage de pression financière. Cela se traduirait par des coûts plus élevés pour tous les voyageurs et pour le transport des marchandises acheminés par voie aérienne. Cette abordabilité réduite pour un secteur industriel qui représente un catalyseur économique indispensable aurait ultimement pour conséquence involontaire d’affaiblir la croissance de l’économie.
« L’industrie aérienne est un catalyseur économique, et non une vache à lait. Pourtant, les gouvernements suggèrent nonchalamment une taxe sur les voyageurs aériens qui représente trois fois les bénéfices annuels de l’industrie aérienne, sans tenir compte des effets secondaires dans un monde réel pour une industrie qui offre une bouée de sauvetage pour des communautés éloignées, stimule les marchés touristiques et achemine les produits locaux vers les marchés mondiaux. De plus, bien que les modalités de la proposition du GSLTF ne soient pas spécifiées, l’histoire nous apprend que ces taxes sont simplement versées au trésor public et que très peu de ces revenus sont consacrés à l’adaptation aux changements climatiques », soutient Willie Walsh, directeur général de l’IATA.
« Le GSLTF prétend que ces taxes de solidarité n’augmenteront pas le coût de la vie pour les citoyens ordinaires et n’auront pas d’incidences sur le budget des ménages. C’est faux. La réalité est que si elles sont mises en pratique, les recommandations du GSLTF vont faire augmenter le coût des voyages aériens pour tous les voyageurs et faire plus de mal que de bien. Prélever des dizaines de milliards de l’aviation va mettre à mal sa capacité d’investir pour atteindre l’objectif zéro net d’ici 2050, modifier la dynamique des routes au point que la connectivité va en souffrir, et priver les pays du soutien économique critique fourni par le transport aérien, » ajoute M. Walsh.