Les cyberviolences, l’enfer derrière l’écran: le body shaming et le patriarcat se digitalisent au Bénin

Valdye Gbaguidi, cyberactiviste, survivante de cyberviolence (VBG) au Bénin
Tout commence souvent par une vibration anodine. Une notification, puis une autre, et encore une autre. Les mots défilent, apparemment inoffensifs, avant de se transformer en lames acérées déguisées en insultes, moqueries, menaces. Derrière les avatars et les pseudos, la haine se déverse et efface les frontières entre le virtuel et le réel.
Au Bénin, comme ailleurs, les femmes sont les premières cibles. Parce qu’elles osent s’exprimer, s’affirmer, occuper un espace public longtemps réservé aux hommes. Les attaques prennent la forme de body shaming, de menaces de viol, de chantage sexuel, ou de la réduction de la femme à son corps. Les réseaux deviennent ainsi le prolongement d’un patriarcat qui mute, se digitalise et frappe en silence.
Pour Valdye Gbaguidi, jeune créatrice de contenus, l’enfer a commencé le jour où elle a osé raconter son histoire. Militante du bodypositivisme, elle promeut l’acceptation de tous les corps, quels qu’ils soient. « Le Bodypositivisme, c’est l’acceptation de tous les corps. Tous les corps ne sont pas pareils et il faut respecter cela. Il n’y a pas à faire de la sexualisation ou critiquer le corps de quelqu’un d’autre juste parce que ça ne respecte pas les normes que la société a établies », explique-t-elle. Mais Internet ne lui a laissé aucun répit.
« J’ai commencé les réseaux à un moment donné où je me sentais un peu seul dans ma vie. J’étais ennuyée. J’ai été victime de viol quand j’étais vraiment beaucoup plus jeune. Et j’en ai parlé. Pourquoi j’en ai parlé ? Parce que je vivais des choses psychologiques et des événements assez traumatisants et qui avaient un rapport avec ça. Par exemple, ma relation avec les hommes en général alors que je grandissais », a confié la créatrice de contenu. Mais ce témoignage intime a réveillé le côté sombre de certains internautes. Très vite, une vague de commentaires haineux s’est abattue sur elle.

« Franchement, il y en a de toute sorte… Et il y en a beaucoup, mais je vais citer ceux qui m’ont le plus marqué. Sexualisation, certains ont dit qu’avec le corps que j’ai, c’est normal qu’on me viole. Certains ont critiqué ma poitrine. Ils ont dit que ça ressemble à des ficelles qu’on attache à un arbre pour grimper ».
Chaque mot la déchirait un peu plus, elle a cessé de regarder dans le miroir et a envisagé la chirurgie pour correspondre à ce que les autres exigeaient d’elle.



