Bénin – 73,02 % au Bac 2025 : un taux « politique » ou un bac trop « facile » ?

Baccalauréat, diplôme qui sanctionne la fin des études secondaires et qui ouvre la voie aux études universitaires. © Bénin Web TV
Jamais depuis la création de l’examen national, le Bénin n’avait franchi la barre des 70 % de réussite. Le précédent record remontait à 1971 avec 63,2 % d’admis, un seuil tout juste dépassé en 2021 (64,42 %). Le 73,02 % de 2025 pulvérise donc ces références et établit un nouveau sommet. À titre de comparaison, le taux de réussite national oscillait souvent entre 20 % et 45 % de 1990 à 2010, avec un creux historique de seulement 8,13 % en 1983 lors d’une grave crise du système éducatif. Durant les années 2010, le pourcentage d’admis est resté relativement modeste (souvent sous les 40 %), mis à part quelques pics (46 % en 2005, 42 % en 2017) suivis de replis.
Il faut surtout noter l’évolution depuis 2018-2019, où le taux est brusquement passé d’environ 33 % à plus de 50 %. Cette tendance s’est confirmée par la suite, avec 64,42 % d’admis en 2021 (un premier record en 50 ans) puis quelques fluctuations liées à la difficulté des épreuves ou au contexte (59 % en 2022, 56,93 % en 2024). L’année 2025 marque donc une hausse spectaculaire de plus de 16 points par rapport à 2024 (56,93 %), ce qui atteste d’un progrès sans précédent sur une si courte période. En 2025, sur 78 537 candidats ayant effectivement composé, 57 349 ont été déclarés admis, contre environ 44 700 admis l’année précédente. Le caractère exceptionnel de cette performance est unanimement reconnu – reste à en expliquer les raisons.
Performance réelle ou taux « politique » ?
Face à ce bond spectaculaire du taux de réussite, une question est sur de nombreuses lèvres. Cette performance reflète-t-elle uniquement une amélioration réelle du niveau scolaire, ou a-t-elle été facilitée par des choix « politiques » visant à afficher de bons résultats ? Autrement dit, le Bac 2025 a-t-il été plus facile ? Les avis divergent.
Du côté du gouvernement et des responsables éducatifs, le discours est sans ambiguïté. Ce succès est avant tout le résultat d’un travail acharné de tous les acteurs (élèves, enseignants, encadreurs) dans le cadre des réformes engagées, et en aucun cas d’une baisse des exigences. Ils mettent en avant la méritocratie et les efforts fournis. Le Directeur de l’Office du Bac a d’ailleurs publiquement félicité les acteurs du système ainsi que le Chef de l’État pour ces résultats « exceptionnels et inédits », en soulignant qu’« avec persévérance et rigueur dans le travail, on peut réaliser de grandes choses ».
Cependant, certains observateurs émettent l’hypothèse d’un examen 2025 plus abordable qu’à l’accoutumée. D’après un acteur du système éducatif interrogé par le quotidien Fraternité, « l’absence de grèves, un meilleur encadrement, [la] responsabilisation accrue des enseignants et des épreuves calibrées pour le candidat moyen » seraient autant de facteurs explicatifs de ce taux record. Cette remarque suggère que les sujets du Bac 2025 ont pu être adaptés à un niveau moyen raisonnable, sans questions pièges ni exigences disproportionnées, de sorte qu’un élève correctement préparé ait de bonnes chances de réussir. Dire autrement, on aurait évité un examen trop élitiste pour privilégier une évaluation plus en phase avec le niveau général des élèves. Si tel est le cas, ce choix peut être vu sous deux angles. D’une part, il valorise davantage d’élèves et concrétise l’effort collectif consenti depuis des années ; d’autre part, il pourrait être interprété comme une façon de gonfler artificiellement le taux de réussite pour des motifs politiques ou d’image.
Toutefois, il est difficile, sans une analyse fine des épreuves et des notes, de trancher sur cette question. Le fait que tous les examens nationaux de 2025 (CEP, BEPC, Bac) aient connu une hausse notable pourrait accréditer la thèse d’une amélioration du système dans son ensemble – ou celle de directives ayant encouragé une certaine bienveillance dans la notation. Notons par exemple que le BEPC (Brevet, de fin du premier cycle) a dépassé 77 % de réussite cette année, un score lui aussi très élevé. L’augmentation du taux de réussite au Bac s’inscrirait donc dans une tendance de fond entamée depuis 2018.